Elle poussa la porte du manoir décrépie, un sourire amusée sur les lèvres. La porte grinça comme toujours, alors qu’Atropos était certaine de n’avoir exercer sur le bois qu’une pression légère. Ses pas glissèrent sur le sol, aériens et discrets ; elle avait toujours marché ainsi, essayant tant bien que mal de se montrer digne, d’être celle que les autres femmes regardaient avec envie ; parce qu’elle était la descendante de Serpentard, parce qu’elle avait le même don que lui. Elle avait beau être née d’inceste, ils avaient beau moqué sa maison, elle leur était supérieure. Elle était d’un sang pur, d’un sang noble, et leur sang allait bientôt recouvrir le sol de sa maison s’ils continuaient ainsi. Alors Atropos marcha comme un serpent qui glissait sur le sol, attrapa vivement une écharpe et sortit, la couleur bordeaux de l’écharpe ressortant contre sa sombre chevelure. Ses pieds n’avaient guère besoin d’entendre des ordres de son cerveau, ils savaient déjà où aller, dans quelle direction trouver le refuge que le cœur d’Atropos souhaitait. Ses pieds étaient guidés par des sifflements obscurs, venant des profondeurs de la terre, créatures chtoniennes, ou bien tout simplement des sifflements qui sortaient de la bouche de la jeune Gaunt. Des sifflements qui ne signifièrent rien, car ce n’étaient que de simples bruits, sans but précis. Et puis, au fur et à mesure qu’Atropos approcha ces buissons dans une partie sombre de la forêt, les sifflements devinrent significatifs, les sons circulant entre les feuilles jonchant le sol mouillé par les pluies torrentielles des derniers jours, se frayant un passage entre les cailloux, trouvant leurs destinations dans leurs orifices attentifs de serpents, ayant attendu avec impatience la venue de leur Reine. Car c’était ce qu’elle était, leur Reine, elle, la dernière des Gaunt, celle qui n’était que la dernière des filles, celle qui ressemblait aux autres membre de sa famille, tout simplement parce que le sang n’était pas renouvelé depuis des années. Et là, elle était arrivée, dans ces buissons qui s’effaçaient devant des roches sur laquelle, elle se posa, dignement. Ce n’était pas un trône doré, ni même un trône de fer, mais il était le sien, dans son petit monde où elle était plus qu’une simple jeune femme. Venez, la cours est ouverte. et ils arrivèrent, la suivant, levant leur tête, en un mouvement d’hésitation, d’admiration, de fascination. Quelles nouvelles m’apportez vous ? Parce qu’une Reine devait tenir sa cours, devait entretenir l’amour de ses sujets, et qu’importait si finalement, Atropos Gaunt n’était la reine que de son petit monde, que de ses serpents qui la regardaient avec tant d’affection, bien plus que toute sa famille réunie. Elle avait trouvé les siens, sur une roche, dans la forêt, et elle comptait les garder, leur offrant le monde s’il le fallait. Approchez.

Le soleil déclinait doucement dans le ciel, ses rayons venant effleurer l’horizon alors que la lune, elle, était prête à se dévoiler le temps d’une nuit. Astra avait toujours aimé la nuit. Elle se sentait mieux entouré du halo mystérieux de la lune, plutôt qu’agressé par les rayons du soleil. Peut-être était-ce pour cela que sa peau était aussi pâle, elle ne saurait le dire. Cette affinité avec la nuit, Astra la retrouvait partout dans sa vie. Sa peau pâle, détestant le moindre UV. Ses cheveux noirs comme l’ébène. Sa naissance, le premier du mois de janvier, alors que les jours sont courts et les journées sombres. Sa fascination pour les sciences occultes, et les potions, dont beaucoup d’ingrédients ne peuvent être récoltés que la nuit. Son affinité avec les serpents, également. Créatures incomprises, détestées par certains, redoutées par d’autres, elles ne sont pour Astra, qu’une source de fascination. Les serpents sont le symbole de sa Maison, caractérisés par du vert émeraude magnifique et de l’argent flamboyant. Mais avant tout, les serpents sont l’héritage de sa famille. Les serpents, ce sont ces animaux avec lesquels ils sont capables de converser, effrayant toutes les autres personnes n’ayant pas ce don. Parce que oui, c’était un don que possédait Astra. Un don fascinant et effrayant à la fois, un don qui coulait dans son sang, son héritage, une chose que toutes les mise à sac, que tous les pillages commis par le Ministère sur leur famille pour les punir d’avoir suivis leurs idéaux, ne pourront leur enlever. C’était là, dans leur sang, dans leur famille depuis des générations. Ce sifflement si particulier qui donna lieu au symbole du grand Salazar Serpentard, son propre ancêtre. Le Fourchelangue avait beau être vu comme un signe de mal, de danger, de perfidie, jamais Astra ne l’avait considéré ainsi. Elle trouvait cela révoltant qu’on puisse accepter les Métamorphomages, et pas les Fourchelangues. Préférer une personne pouvant tromper n’importe qui en changeant d’apparence à volonté était donc plus digne de confiance qu’une personne simplement capable de parler à un animal ? C’était ridicule et totalement incompréhensible. Astra voulait faire briller sa famille, son nom, depuis qu’elle était en âge de comprendre leur histoire. Faire respecter, et non pas craindre, leur capacité familiale faisait aussi partit de ses projets. Parce qu’ils ne faisaient pas que utiliser leur don pour faire de mauvaises choses. Jamais Astra n’avait manipulé un reptile pour lui faire commettre une infamie. De toute manière, comment le pourrait-elle, si l’animal n’était pas d’accord ? Qui était-elle pour le forcer à faire faire une chose qu’il ne désirait pas à un animal qu’elle respectait énormément, qu’elle avait fait tatouer sur sa peau ? Elle avait décidément bien plus de facilité à manipuler les humains.

Un cri aigu la sortie de ses pensées, et elle tourna brusquement la tête vers son origine. A la lisière de la forêt interdite, là où elle marchait depuis un petit moment déjà dans le simple but de trouver un peu de calme, se trouvait visiblement une jeune fille. Astra ne pouvait en apercevoir que sa silhouette, sur le sol, essayant visiblement de fuir quelque chose. Suivant son impulsivité naturelle, Astra alla voir ce qui se déroulait, dégainant sa baguette – après tout, elle ne savait pas face à quoi elle allait se retrouver. Il était rare que des créatures dangereuses approchent la lisière de la forêt, sans compter qu’elle était certaine d’avoir lu quelque part qu’une barrière magique se trouvait là pour protéger les élèves, mais l’on était jamais trop prudent. Elle fronça les sourcils en constatant, eh bien, qu’elle ne voyait absolument aucune menace en face de la jeune fille – elle devait sûrement être en première ou deuxième année. S’approchant encore, elle se baissa un peu à sa hauteur. « Il y a un problème ? » La petite lui lança un regard empli de soulagement, alors Astra en déduisit qu’elle avait réellement un problème. Sauf que la Serpentard ne pouvait pas du tout dire lequel. La petite Poufsouffle – comme l’indiquait son blason – pointa un doigt tremblant en face d’elle, en direction du sol. « Il y a un… un serpent ! » La première réaction qui vint en tête d’Astra fut d’éclater de rire, car pour elle, il était absolument ridicule de craindre les serpents. Elle préféra cependant se retenir, imaginait déjà les ragots sur son compte, comme quoi elle s’était moquée d’une première année terrorisée par un de ces reptiles du diable que chérissait sa famille, alors qu’elle-même n’avait rien à dire dans la mesure où elle craignait un simple labrador. Rangeant sa baguette, Astra s’agenouilla à son tour, lançant ce qu’elle pensait être un sourire rassurant. « Ne t’en fais pas, je vais le faire partir. » Elle se tourna ensuite vers le reptile et, tentant de faire le vide dans son esprit, elle ouvrit à nouveau la bouche. Cette fois-ci, un sifflement en sortit, attirant immédiatement l’attention de ce qu’elle supposa être une vipère. Astra eut un léger sourire à cela, car elle avait toujours quelques ratés quand à la maîtrise de son don. Son père lui avait évidemment apprit l’art de communiquer ainsi, mais cela restait un langage compliqué. En plus de cela, si elle se concentrait trop sur la langue a adoptée, elle ne parvenait à produire que de l’anglais. Plus elle se sentait à l’aise et faisait cela de façon naturelle, plus son sifflement était meilleur. En quelques secondes à peine, le reptile disparu dans les fougères et Astra ne rata pas le soulagement visible sur les traits de la jeune fille, qui détendit son corps également. « Me-merci. Je ne savais pas qu’on pouvait… parler aux serpents. » Elle ne semblait pas bien sûre de ses dernières paroles, et Astra lui offrit un nouveau sourire, tentant de la mettre à l’aise. « C’est un don dans ma famille. Les gens sont généralement effrayés par cela, mais comme tu le vois, on peut aussi aider les autres grâce à lui. » Toujours discrètement prêché la bonne parole dès qu’elle en avait l’occasion. Faire s’élever sa famille dans la société et améliorer leur réputation ainsi que celle du Fourchelangue allait être compliqué, mais Astra avait bon espoir.

Je portais mon verre à mes lèvres, sentant un jus frais descendre le long de ma gorge. Il n'y avait rien de tel qu'une boisson rafraîchissante durant une chaude journée d'été. Habitué à la brise écossaise, je trouvais cette subite augmentation de température aussi inattendue que contraignante. Il faut dire que je n'étais pas familier du soleil et de ses rayons destructeurs. Reposant ma coupe sur la table, je m'essuyais le visage d'un geste ingrat, n'ayant que faire de salir mon vêtement. Demain nous irons au chemin de traverse te chercher tes affaires pour la rentrée Blaise, avant de te ramener chez toi. J'écoutais sagement ma tante alors que je bouillonnais d'excitation à l'intérieur, luttant contre moi-même pour ne pas exploser de joie, me contentant simplement de sourire. Enfin, j'allais fouler le sol de la plus prestigieuse école de magie. Depuis que j'avais reçu le courrier, je n'avais fait qu'y penser. Poudlard n'attendait que moi. Je m'imaginais déjà volant dans les airs, représentant fièrement les couleurs de Gryffondor. Parce que, oui, je savais d'avance que je voulais faire parti de l'équipe de quidditch, et j'étais sur d'être réparti chez les lions, n'ayant pas les qualités requises pour les autres maisons de toute manière. Je vais faire un tour dehors, l'air s'est rafraîchi. annonçais-je tout en me levant de table, laissant à ma tante le soin de nettoyer la vaisselle grâce à la magie. Je rêvais de savoir faire tout ça, un jour, moi aussi, je deviendrai un grand sorcier et j'aurai ma propre carte de chocogrenouille. L'espoir fait vivre dit-on, en tout cas, il m'anime grandement, voilà tout ce que je sais. Après un rapide signe de la main, je m'aventurais dans les hautes herbes qui entouraient la demeure familiale. L'Ecosse, j'aimais y passer mes vacances, il n'y avait pas énormément de choses à faire mais c'était toujours un véritable bol d'air pur, un moyen d'échapper un peu à ma routine anglaise. Marchant d'un pas lent et serein, j'admirais la lune brillante et pleine éclairant suffisamment pour que j'arrive à me repérer. Une très légère brise venait caresser ma chevelure frisée, j'appréciais le moment. Le calme religieux fut profané par un craquement. Rien ne venait troubler mon champ de vision, je retournais donc à mes occupations premières. Seulement, un autre bruit se fit entendre et cette fois-ci, je sentais que quelque chose ne tournait pas rond. Je me sentais épié, surveillé, traqué. D'un pas vif, je reprenais le chemin menant à la maison familiale. Il n'y avait que quelques mètres me séparant du pallier de la porte, mais ceux-ci paraissaient bien plus longs que d'ordinaire. Ce fut à ce moment là qu'on m'agrippa la jambe et que je me retrouvais à manger de la terre d'un coup sec et violent. Une douleur vive au mollet m'arracha un cri strident. On me traînait de force au sol, et je tentais de m'agripper à la moindre chose me passant sous la main, en vain. A l'aide ! Mais je voyais le point lumineux que représentait le foyer, s'éloigner au fur et à mesure jusqu'à disparaître de mon champ de vision. Mes rêves s'évaporaient en un battement de cils. Je ne sais pas si je vais mourir ce soir, mais j'ai un instinct de survie qui se réveille en moi. Pitié, laissez moi partir. suppliais je. Je pensais à mes parents qui seraient anéantis de la nouvelle, mes sœurs que je laissais seules, mes amis. Finalement, ma course s'arrêta et la pression exercée sur mon mollet stoppa. Je m'empressais de retirer ma jambe, et d'un coup sec, je me relevais ou du moins tentais de le faire, je sentais une vive douleur là où l'on m'avait agrippé. C'est à ce moment là que je le vis. Grand de plusieurs mètres, les yeux luisants, recouvert de poils et semblable à un loup, je n'étais pas certain de savoir nommer la créature qui se tenait debout face à moi. Présente uniquement dans mes rêves, ou plutôt mes cauchemars, les plus fous, ce lycanthrope venait de me mordre et j'étais juste là, tétanisé, sans bouger, n'arrivant pas à réagir ni à déguerpir. Finalement, après plusieurs secondes ou minutes, je ne saurais le dire, je me mis à marcher, puis courir, jetant des coups d’œils derrière moi. La bête n'était plus là, elle avait disparu. Avais-je rêvé tout cela ? Ma jambe me disait le contraire. Je traînais mon corps comme une carcasse avant d'enfin apercevoir la fin de mon calvaire. Mais une pensée traversa mon esprit, s'il m'avait bel bien et mordu, je deviendrais comme lui ? Ce monstre avide de sang aux crocs acérés ? Jamais Poudlard ne voudra d'un hybride de la sorte, jamais et je serai condamné à errer telle une âme en peine. Déglutissant, j'essayais d'enlever les résidus de terre, d'herbe et de saletés pour paraître le plus propre possible. Personne ne doit savoir ce qui vient de se passer, jamais. Je me pressais pour monter à ma chambre afin de soigner ma plaie, la bander et prétendre que cette nuit n'a jamais existé.